mercredi 28 décembre 2011

Indicateurs économiques américains : rassurants ou inquiétants? Tout d’horizon de quelques indicateurs

Les derniers chiffres du chômage aux Etats-Unis indiquent un léger recul des inscriptions au chômage. Il s’établit donc à 8.6% pour le mois de novembre. Qu’en est-il vraiment ?
Selon le BLS (Bureau of Labor Statistics) la durée de chômage s’allonge.



Une fois de plus, l’écart entre les chiffres officiels et réels (qui tient comptent de paramètres supplémentaires) est significatif puisque l’on passe du simple au double : selon les chiffres officiels les chômeurs de plus de 27 semaines représentent 4%  alors qu’ils sont plus de 7% si on inclut les chômeurs non inscrit au chômage.

Sur les cinq dernières décennies le taux de chômeurs longue durée était relativement bas, la moyenne 1948-2008 est inférieure à 2%. A partir de 2008 ce taux double pour atteindre 4%.


Depuis la crise financière de 2008, la durée moyenne du chômage a progressé de 122% (graphe n°2) ! passant environ de 18 semaines à 40 semaines. Cela démontre bien que le chômage élevé des États-Unis est structurel et non plus conjoncturel comme on pouvait le penser puisqu'il dure.

Phénomène conjoncturel ou structurel ?

La crise obligataire mondiale ne peut que faire qu’empirer la situation. Les politiques budgétaires restrictives sont nécessaires pour réduire le déficit et la dette. Cela passe par davantage d’impôts et de prélèvements donc moins de consommation et moins d’investissement pour soutenir la croissance. Paralèlement la fragilité des banques due à la dépréciation de certains de leurs actifs (ex : dettes d’états, subprimes…) peut engendrer un credit de crunch et limiter l’approvisionnement en liquidité auprès des entreprises et des ménages.

Aux États-Unis on préfère éviter de parler de politique budgétaire récessive, pourtant nécessaire pour résorber la dette, mais plutôt de relance de la croissance. Pour ce faire, la réserve Fédérale Américaine inonde le marché de liquidité. Le problème est que l'argent circule en circuit fermé et reste en possession des banques. Parallèlement la croissance est faible au regard des dépenses ce qui contribue à l'augmentation de l'endettement. Ce qu’il faudrait ? Repenser le modèle économique Américain qui est basé en grande partie sur la consommation (elle-même soutenue par le crédit donc l’endettement). Ces dernières années les Américains ont prit conscience du danger des crédits et préfèrent repousser leurs achats plutôt que de s’endetter davantage. Si la consommation plonge comment soutenir la croissance autrement ? Les leviers sont limités. Il y a les exportations mais elles sont soumises à plusieurs facteurs : coût du travail, parité du dollar avec d’autres monnaies comme l’Euro ou le Yuan.



Chiffres du chômage selon un bureau indépendant :


Taux de chômage aux Etats-Unis entre 1995 et 2011 selon des méthodes de calculs différentes.

- La courbe bleue inclus les estimations chômeurs découragés à court et long-terme (paramètre exclu depuis1994).
- La courbe grise inclus les estimations de chômeurs découragés à court-terme uniquement.
- La courbe rouge représente le taux de chômage officiel.
- Le chômage aux États-Unis est donc deux fois plus élevé que ce qu’indiquent les chiffres officiels. Environ un Américain sur cinq est au chômage en ce moment aux États-Unis.


L’injection massive de liquidité destinée à relancer la croissance :





Depuis la crise financière de 2008 l’impression du dollar est fulgurante, la planche à billets tourne à plein régime !  Pas étonnant donc que le dollar se déprécie. Le maintient des taux d'emprunts à des niveaux proches de zéro contribue aussi à déprécier le dollar US. Si les chinois sont accusés de manipuler leur monnaie, ils ne sont visiblement pas les seuls.

Les États-Unis éprouvent de plus en plus de difficulté à trouver des acquéreurs de leurs dettes. C’est donc la Réserve Fédérale Américaine qui achète les bons du Trésor. La création monétaire permet d'acheter ces obligations et de maintenir à un faible niveau le taux d’emprunt Américain  à dix ans.

Une des motivations d’imprimer massivement du dollar US était de fournir suffisamment de cash aux banques pour qu’elles soient en mesure de fournir des prêts aux entreprises pour qu’elles investissement. Pendant la crise financière de 2008, les banques avaient du mal à se financer (crédit de crunch). Elles n’accordaient pas ou très peu de crédit aux entreprises. La réalité est que cet argent créé a été investit par les banques dans les matières premières, marchés actions et autres produits financiers au lieu de profiter aux entreprises. Une autre motivation peut s’expliquer par la volonté de déprécier le dollar pour être plus compétitif, exporter davantage et donc relancer la croissance.


Indice PMI :

L'activité des industries manufacturières s'est accélérée aux États-Unis en novembre, selon l'indice des directeurs d'achats de ce secteur publié jeudi par l'association professionnelle ISM.
L'ISM manufacturier, a progressé de 1,9 point par rapport à octobre, pour s'établir à 52,6%, alors que la prévision médiane des analystes le donnait à 51,0%, en très légère hausse sur un mois.

Le secteur manufacturier est le moteur principal de la reprise économique des États-Unis. Selon les chiffres de l'ISM, son activité progresse sans discontinuer depuis vingt-huit mois.


L’immobilier :

La ville de Détroit (Michigan, Etats-Unis) a fait l’objet d’expropriation colossal lors de la crise des Subprimes, selon les certaines sources un foyer sur vingt a été victime d’expropriation.

Les banques Américaines, qui possèdent une pléthore d’actifs immobiliers invendables, vont jusqu’à les brader pour un dollar US symbolique. L’entretien des maisons coûtent très cher. Les banques préfèrent donc se débarrasser de leurs biens immobiliers puisque les garder coûtent encore plus cher.

Selon le journal britannique Le Guardian, un tiers de la population de Détroit est au chômage, les prix immobiliers ont chuté de 80% ces trois dernières années. Le prix moyen de vente l’an passé était de $7,500 (environ 5.500€).
Selon cette même source, une personne aurait acheté le terrain pour $95 et la maison pour $5. Si Détroit est un cas extrême, l’immobilier reste stable voire en léger recul dans les autres états. Le marché immobilier aux Etats-Unis reste donc fragile.

Le président de la Fed, Ben Bernanke, a suggéré au début du mois de novembre 2011 que l'institution puisse reprendre ses achats de titres financiers adossés à des prêts immobiliers, estimant que ce marché était l'une des clés pour faire accélérer la croissance de la première économie mondiale. Très astucieux de racheter ces titres pour soutenir le marché de l’immobilier…. de quoi dégrader encore un peu plus le bilan déjà  mauvais de la Fed…

vendredi 2 décembre 2011

Vers un retournement durable de la politique monétaire Chinoise ?

Largement dépendante de ses exportations, l’économie Chinoise subit les effets du ralentissement économique des occidentaux. Le contexte économique actuel (faible croissance due en partie par la rigueur budgétaire pour faire face à l’explosion des dettes d’états) provoque une chute du moral des ménages et des entreprises. En effet, les ménages préfèrent épargner plutôt que de consommer et les entreprises préfèrent repousser à plus tard leurs investissements ou alors avec parcimonie. Les perspectives de croissance sont revues à la baisse et la visibilité des entreprises n’excèdent pas six mois. Cela impact donc fortement la demande et donc les exportations.


L’indice manufacturier Chinois au plus bas depuis 2009

L’indice PMI (Purchasing Managers Index) est passé sous la barre des 50 en Chine pour le mois de novembre. Un indice inférieur à 50 indique une contraction de l'activité, un indice supérieur à cette valeur correspond à une expansion.

Selon la fédération chinoise de la logistique et des achats (CFLP) l’indice vaut 49 pour novembre alors qu’HSBC a calculé un indice encore plus faible 47,7. En octobre, les exportations chinoises vers l'Union européenne ont reculé à 28,74 milliards de dollars, contre 31,61 milliards en septembre, tandis que celles vers les Etats-Unis ont également diminué, à 28,6 milliards de dollars contre 30,11 milliards de dollars en septembre.

Evolution du PMI Chinois depuis 2008

Il est intéressant de constater que pour le mois de juillet 2010 le calcul d’HSBC suggère un PMI inférieur à 50 alors que selon le gouvernement le PMI est supérieur à 50. A noter également que depuis le début d’année la tendance du PMI est à la baisse.


Changement de cap radical de la politique monétaire ?

Jusqu’à présent la principale préoccupation du gouvernement était de combattre l’inflation. Inflation qui provient notamment des différentes injections de liquidités mise en place après la crise financière pour soutenir la croissance chinoise. Le ralentissement de l’activité manufacturière, bien que faible, montre la vulnérabilité de la croissance. En-dessous de 8% de croissance par an, le chômage augmente en Chine. Cela menace directement la stabilité sociale du pays. Le gouvernement Chinois a donc décidé de diminuer le ratio des réserves obligatoires des banques afin qu’elles fournissent des crédits aux ménages et aux entreprises et contrebalancer la chute de la demande externe. Le ratio des réserves obligatoires est donc passé de 21,5% à 21% donnant ainsi l’accès à 390 milliards de Yuan (environ  $61 milliards de dollar) supplémentaires.

                           Evolution du ratio de réserves obligatoires des petites et grandes banques chinoises sur la période 01/2002 à 01/2011

Les perspectives de croissance en Europe et aux Etats-Unis étant faibles pour les prochains mois voire années, il n’est pas impossible que le gouvernement Chinois continue de baisser le ratio de réserves obligataires voire même les taux d’intérêt pour rendre l’accès au crédit encore plus facile. Si les grandes entreprises chinoises se financent facilement auprès des banques ce n’est pas le cas des petites et moyennes entreprises. Ces dernières doivent trouver d’autres sources de financement dont le coût est plus élevé (exemple : elles se financent auprès de grandes entreprises à des taux d’intérêts prohibitifs). 

Si le gouvernement Chinois met en place une politique monétaire accommodante, elle est moins forte que celle mise en place après la crise financière de 2008. Changement de cap donc, certes, mais léger pour l’instant.  Il s’agit d’un signal fort qui indique que si la situation l’exige, la politique monétaire accommodante sera davantage soutenue.